LePrésident du C.A.P
interview de Ronan Chérel de Sud-Ouest
PHOTO R. C.
« Les meilleures œuvres, celles qui interpellent »
Publié le 07/02/2017 à 3h39. Mis à jour à 15h32 par Ronan Chérel
Antoine Frérot adhère à l’œuvre de Guy Le Meaux.
Le PDG de Veolia préside aussi le Centre d’arts plastiques, par pur amour de la peinture.
Antoine Frérot avait coché cette date du 4 février dans son agenda pourtant très chargé. Le PDG de Veolia Environnement met un point d’honneur à assister aux vernissages des expositions du Centre d’arts plastiques (C.A.P), qu’il a accepté de présider. Par amour de l’Art, avec un grand A.
« Sud Ouest » Où votre amour de l’art puise-t-il sa source ?
Antoine Frérot « Je suis amateur de peinture, au départ. Ça m’est venu vers l’âge de 20 ans. J’ai commencé à éprouver une attirance pour la peinture, les formes picturales. J’ai d’ailleurs acheté ma première œuvre avec ma solde de soldat. Oh, une petite gouache… J’étais en Allemagne. Même si la solde était maigre, nous ne dépensions pas beaucoup. C’est par la peinture que je suis venu aux arts premiers et, de là, surtout, à l’art brut. »
Qu’avez-vous ressenti pour vibrer ainsi en découvrant l’art brut ?
L’art brut émane de gens qui n’ont pas d’attache avec l’art. On parle souvent, d’ailleurs, d’« art des fous ». Je ne suis pas attiré par la dimension historique ou politique de l’art. Je préfère l’expression de l’intériorité, les artistes qui éprouvent le besoin de peindre pour que leur être, leur esprit ne fassent qu’un avec le monde qui les entoure. Leurs œuvres me parlent de moi, me font me connaître. C’est peut-être une manière de décrocher de cette vie à 100 à l’heure que je mène, de retrouver de l’intimité avec moi-même, de replonger dans l’anonymat. On en a peu, dans ma position.
Êtes-vous passé de la contemplation à l’acte de peindre ?
Non, je ne peins pas moi-même. Il me faudrait du temps, pour cela. Acquérir aussi certaines techniques. Je consacre donc l’essentiel de mon temps libre à visiter des expositions, des musées.
Vous vous êtes également constitué votre collection d’œuvres. L’une d’elles a-t-elle votre préférence ?
Je n’ai pas de pièce préférée. Je possède peu d’œuvres que je regrette d’avoir acquis. Je le dis parce qu’il arrive que certaines œuvres s’épuisent, qu’elles ne vous « parlent » plus. Vous les trouvez bavardes, superficielles, pas assez profondes. À l’inverse, ça se voit, quand un artiste a réellement été dans la nécessité de réaliser une pièce. Les meilleures œuvres, à mon sens, sont celles qui vous interpellent plus qu’elles ne vous plaisent immédiatement. J’ai ainsi dans ma propre collection, des œuvres qui me replongent encore dans les sensations que j’ai éprouvées quand je les ai découvertes, voire dans de nouvelles sensations. C’est vivant, une œuvre d’art !
Dans quelles circonstances êtes-vous devenu président du Centre d’arts plastiques de Royan ?
C’est Jean-Pascal Léger qui m’a sollicité. Nous nous connaissions, nous partageons la même vision de la peinture. Il avait besoin d’un président, il m’a proposé de le devenir. Oh, ce n’est pas une tâche très harassante (sourire). Elle consiste essentiellement à venir assister aux vernissages des deux expositions annuelles et au conseil d’administration, une fois par an, mais avec Jean-Pascal Léger, nous échangeons régulièrement. Et nous nous rencontrons aussi à Paris lors d’événements culturels.
Vous connaissiez Royan ?
« Je ne connaissais pas particulièrement Royan, non. Je connais quelques élus locaux, Didier Quentin et son épouse Marie-Pierre, Dominique Bussereau, également. Royan, désormais, je la vois à deux saisons différentes, en hiver et en été. Je lui trouve à la fois des côtés un peu surannés de station chic d’antan et des aspects de station balnéaire populaire d’après-guerre. Cela s’accompagne, du coup, d’un mélange de population très intéressant.
Comment concevez-vous votre rôle de président du CAP ?
« Je n’ai pas d’ambition particulière pour cette association, si ce n’est l’envie de montrer aux gens de la vraie peinture, c’est-à-dire quelque chose qui ne soit pas superficiel ou seulement dans l’air du temps. Il existe beaucoup de modes, dans l’art, déjà parce qu’il existe un « marché » de l’art. J’apprécie, chez un artiste, son interrogation sur lui-même et son rapport au monde et la nécessité qu’il éprouve à l’incarner dans un art graphique. À l’image de Guy Le Meaux. Je pense, en voyant les œuvres présentées ici, qu’il n’aurait pas pu faire autre chose que peindre. Quand on se lance dans la peinture, on mange souvent de la vache enragée, à ses débuts. Il faut donc bien ressentir de l’allégresse, une joie profonde quand une œuvre incarne ce que vous avez voulu dire, que ça réponde à un besoin profond ! »
Justement, vous connaissiez l’œuvre de Guy Le Meaux ?
Très peu, je la découvre mieux à la faveur de cette exposition. Je la trouve… très forte, poignante. Il a une démarche très spécifique. C’est, pour moi, un peintre de la pensée, un peintre « savant », au sens où l’on sent qu’il a une connaissance très poussée de la peinture et qu’il est connecté, également, avec la littérature. Vraiment, c’est une exposition à voir !